Obama : le télétravail est-il le plein-temps du futur ?

Découvrir la raison pour laquelle la croissance de l’emploi est si faible en Amérique, alors que le PIB et d’autres indicateurs économiques sont en nette amélioration, est un noeud Gordien que le Ministère des Emplois essaie de dénouer depuis des mois déjà. Il n’est donc pas surprenant que le Président Obama a fait de ce mystère le sujet central de son discours sur l’Etat de l’Union ce Mardi, en mentionnant le “ taux de chômage le plus bas depuis ces dernières années ”. Les américains sont, après tout, désireux de voir les résultats des actions prises par le gouvernement pour aider les 10.4 millions de chômeurs présents dans les Nations Unies. Alors voici la question que tout le monde se pose : Pourquoi est-ce que le taux de chômage baisse alors qu’un emploi stable est toujours aussi dur à trouver ?

La vérité cachée a été trouvée en examinant de près la croissance explosive du nombre d’indépendants depuis la Grande Récession. Voici ici quelques chiffres peu souvent mentionnées : Un américain sur trois est un travailleur indépendant, soit environ 42 millions de personnes selon l’Union des Freelancers qui se charge de recenser cette population .  Cela représente un tiers  la main d’oeuvre des Nations-Unies. Ce groupe inclus dans le groupe des travailleurs indépendants les individus qui ont des emploi non-traditionnels et non-permanents, y-compris les employés à temps partiel et les prestataires indépendants.

Selon Steve King, un partenaire d’Emergent Research, une entreprise qui étudie les travailleurs indépendants, “ Une tempête parfaite est derrière ce phénomène. «  Parmi les tendances affluentes se trouvent :

-Le développement de technologies de communications permettant de partager son travail virtuellement.

-Une augmentation du nombre de marchés pour les indépendants chez les petites et moyennes entreprises et les particuliers.

-La peur que l’ “ Obamacare ” ne fasse augmenter les prix des services de santé.

-Un changement dans la structure des entreprises, favorisant la recherche de collaborateurs externes, afin de pouvoir augmenter et réduire leurs effectifs selon la demande du marché.

-Les retraités du baby-boom cherchant de nouvelles carrières.

-Une plus grande partie de la génération Y optant pour l’entrepreneuriat et le travail indépendant.

 » Ces tendances devraient continuer à gonfler les rangs des travailleurs indépendants d’environ 6% par an pendant les cinq prochaines années, pendant que le marché du travail continuera de changer. «  prédit King.

-Steve King, partenaire, Emergent Research

Etant donné l’évolution des effectifs de travailleurs, les économistes du travail espèrent pouvoir analyser les diverses nuances de l’économie du travail indépendant plus en détail, au delà de la situation des travailleurs à mi-temps. Beaucoup d’Américains s’inquiètent du remplacement progressif des emplois à temps-plein, avec une assurance santé et un salaire régulier, par des emplois à temps partiel ou contractuels. Cette évolution a laissé un grand nombre d’entre eux bloqués dans une longue -et souvent futile- recherche pour un CDI.

Néanmoins, certains travailleurs ont su tirer partie de cette situation.

Quelques entrepreneurs indépendants, comme Nic Mayne, 20 ans, ont saisi les opportunités ouvertes par la confiance grandissante accordée à l’aide contractuelle. Son entreprise de trois ans, Mayne Marketing, qui a des branches à Santa Clara en Californie, et Alberta au Canada, est maintenant si populaire qu’il engage fréquemment des contractuels pendant certaines périodes de l’année pour alléger sa charge de travail. Ses revenus annuels, après la déduction des dépenses, tournent maintenant autour des 75.000$.

Les cabinets d’avocats et les grandes entreprises engagent souvent des indépendants pour des travaux qui étaient auparavant effectués par leurs propres employés, de l’écriture du blog de la compagnie à l’élaboration des projets publicitaires.

Parfois, ces clients avaient d’abord cherché un employé à plein-temps pour faire ce travail, en postant des offres d’emploi et en cherchant sur des sites, comme craiglist, pour trouver des employés compétents. Quand Mayne a répondu à ces annonces en suggérant qu’il serait plus efficace pour ces entreprises d’employer des indépendants (qu’ils n’auraient pas à former et ne devraient payer que quand il y a du travail à faire), il nous dit qu’ “ Ils ont décidé d’essayer.

Son expérience a démontré l’utilisation croissante des indépendants par les grandes entreprises américaines. C’est une tendance qui s’est accélérée durant la récession, et ne montre aucun signe d’épuisement. Le site CareerBuilder a établi que pendant l’année 2013, 31% des employeurs pensaient chercher des travailleurs contractuels et temporaires pendant les six derniers mois de cette année ; ce qui représente une augmentation de 10% par rapport à l’année précédente. En même temps, le pourcentage de ceux qui souhaitent employer des travailleurs permanents reste le même, à 44%.

Une autre recherche, cette fois effectuée par Economic Modeling Specialists, une compagnie appartenant à Career Builder,  a déterminé que 15% de toutes les offres d’emploi de 2009 à 2013 étaient des offres à court terme. Selon cette même recherche, dans les grandes villes, desquelles font partie Chicago, Philadelphia, Kansas City, Cincinnati et Milwaukee, plus de 40% des offres d’emplois sont concernées.

Dans ce nouveau climat d’embauche, les marchés indépendant sautent sur l’opportunité de satisfaire les besoins de leurs plus gros clients. Work Market, un site d’offres et une plate-forme de travail pour gérer les travailleurs indépendants et contractuels employés par les grandes entreprises, a découvert que depuis Août 2013, les entreprises de 50 employés ou plus dépensaient en moyenne 52.000$ par mois en employés indépendants à travers leur plate-forme, et emploient les mêmes personnes neuf fois par an en moyenne.

Elance et oDesk,  qui ont récemment annoncé leur fusion prochaine, offrent maintenant tous deux des programmes aidant les entreprises à engager des grands groupes d’indépendants de façon efficace. Ils ont mis l’accent sur l’allégement des formalités (et de la recherche) que ceci peut impliquer. oDesk, qui est utilisé par de grandes entreprises telles que Unilever, Panasonic et D&B par exemple, a endossé le rôle de recruteur et sélectionneur pour certains de ses clients. Il y a du profit à faire, étant donné qu’ils encaissent un pourcentage du salaire des indépendants.

 » Travailler avec de grandes entreprises est pour nous une partie grandissante de notre travail. » a dit Matt Cooper, vice président du département du dévelopement des affaires internationales de oDesk. « Il y a trois ou quatre ans, c’était plus ou moins négligible. Aujourd’hui, ceci représente 10% de nos revenus. Les grandes entreprises veulent une façon plus flexible et évolutive d’engager des effectifs. « 

(Lisez en plus sur : Technology grows freelance economy)

Les grandes entreprises n’engagent plus des indépendants pour de simples travaux de créativité ou technologie uniques comme elles avaient tendance à le faire avant. Elles se tournent de plus en plus souvent vers eux pour temporairement augmenter leurs effectifs (créant ainsi une équipe en parallèle de leurs employés à long terme), ou pour des travaux complexes, comme par exemple réunir des informations cartographiques ; une tâche qui aurait autrefois été éffectuée via une externalisation du processus d’entreprise, nous explique Cooper.

Les grandes entreprises ne sont pas les seules à montrer une confiance grandissante envers les travailleurs indépendants. Beaucoup des mêmes indépendants aiment l’idée de travailler pour de grandes entreprises sans devoir devenir un de leurs employés.  » Pour eux, c’est beaucoup plus agréable que de devoir aller au bureau tous les jours ; et ils se sentent plus libres, maîtres de leur carrière, «  raconte Cooper.

Bien sûr, les indépendants doivent gérer des problèmes occupationnels tels que des quantités de travail variables, des mauvais payeurs, et le prix souvent très lourd d’une bonne mutuelle de santé.

Malgré cela, certains indépendants s’en sortent plutôt bien par rapport à d’autres qui travaillent dans différents secteurs privés. Le salaire horaire moyen était de 24.15$ en Novembre 2013, selon l’Agence américaine des Statistiques du Travail. Les salaires horaires pour oDesk sont en général entre 25$ à 45$ de l’heure pour les travailleure américains, ajoute Cooper. A Elance, les salaires horaires aux Etats Unis étaient de 25$ en moyenne en 2013, c’est à dire 5% de plus que la moyenne nationale de l’année précédente. Beaucoup de contrats dans des domaines spécialisés, comme la technologie, sont bien plus rentables, et le site pousse les entreprises à en poster plus.

« Nous croyons que de plus en plus de personnel compétent va venir sur internet pour des contrats de meilleure qualité, et c’est là dessus que nous allons nous focaliser. » dit Rich Pearson, chief marketing officer à Elance.

Certaines entreprises utilisent à présent des sites indépendants pour engager des indépendants pour un travail qui est encore fait par leurs propres employés dans d’autres entreprises. Jennifer Rambler, mère de trois enfants à Jacksonville, en Floride, teste l’utilisabilité de divers sites internets de chez elle avec la plateforme UserTesting.com, ce qui est utile à des clients tels que Google, Facebook et Twitter. Les clients de UserTesting.com préfèrent tester leurs biens numériques avec leurs utilisateurs usuels plutôt que des testeurs d’utilisabilité professionels.

Rambler, Qui travaillait auparavant dans le secteur des soins de santé, a saisi l’opportunité de travailler de chez elle. Elle gagne environ 10$ pour chaque test de facilité d’utilisation d’un site web, et 15$ pour chaque site web pour mobile testé, chaque test lui prenant environ vingt minutes. Elle aime le fait qu’elle peut conduire ces test aux moments qui lui conviennent.  » Ca m’aide beaucoup à aménager mon emploi du temps«  nous dit-elle.

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Ecrit par Elaine Pofeldt, de CNBC.com.
Article original sur CNBC.com. 
Publié le Mercredi 29 Janvier 2014.
Traduit par Estelle Bascle.